Antoine Garapon et Jean Lassègue, Justice digitale : Révolution graphique et rupture anthropologique, Paris, PUF, 2018.
https://www.puf.com/content/Justice_digitale
"Remplacement des avocats par des robots, disparition des notaires, résolution des conflits en ligne, justice prédictive, état civil tenu par la blockchain, généralisation des contrats en bitcoins échappant à tout contrôle (et à toute taxation) : le numérique n’en finit pas de bouleverser la justice en inquiétant les uns et en enthousiasmant les autres. Plutôt que de proposer un bilan de ces innovations, nécessairement prématuré, ce livre tente de situer l’épicentre anthropologique d’une déflagration provoquée par l’apparition d’une nouvelle écriture qu’il faut bien désigner comme une révolution graphique. La justice digitale alimente un nouveau mythe, celui d’organiser la coexistence des hommes sans tiers et sans loi par un seul jeu d’écritures, au risque d’oublier que l’homme est un animal politique.
Introduction
Première partie – Qu’est-ce que la justice digitale ?
Chapitre I. – Une révolution graphique
La révolution numérique dans la longue histoire de l’écriture
Une technologie aux capacités incalculables
La numérisation
La programmation
L’établissement de corrélations
Les deux registres du logiciel et du matériel
Une écriture muette, opaque et en mouvement permanent
L’écriture informatique n’a pas toutes les propriétés du langage
Une écriture muette et opaque
Une écriture qui a une profondeur
Une autre manière de produire du sens
Risque de désymbolisation dans l’usage appareillé de l’écriture
Une dissociation de l’écriture et de l’institution
Fonction expressive et fonction performative en droit
La prétention de l’écriture numérique à se passer de symbolique
Chapitre II. – L’ordre graphique
Crise de l’espace et du temps
Hilbert : réduire les mathématiques à un traitement graphique
Gödel et le codage numérique
Turing et la machine à calculer
La persistance d’une dimension non écrite
Turing, 1950 : un résultat négatif concernant l’expansion du calculable
L’ordre graphique, la géométrie et le sens
Chapitre III. – Un fait social total
Une promesse politique
Les données, un bien public paradoxal
Une révolution non politique
Une mutation sociologique
Un accès plus direct à la justice
Une démocratisation du droit
Le monopole de la médiation disputé
Une révolution cognitive
La redéfinition du droit par une lecture computationnelle et économique
Les juristes découvrent un nouveau droit
Une nouvelle approche : « droit et mathématiques »
La continuation de la politique, du droit et de la société sans tiers
Chapitre IV. – Un nouveau droit naturel
Le numérique, nouvelle dimension du monde vécu
La nécessité d’un double travail
Un désorganisateur de l’espace et du temps
Une nouvelle croyance collective : la délégation aux machines
Un monde pré-ordonné par le calcul ?
La prolongation du corps sous forme de mémoire externe ?
L’inéluctable délégation aux machines ?
Une étape dans l’autoproduction de la société ?
Un nouveau référent abstrait pour les institutions juridiques
Une forme symbolique normative
Une norme de jugement de la justice
Sauver le jugement de son humanité
Une décision plus impartiale que celles des hommes
Est-il possible de substituer le calculable au symbolique ?
Chapitre V. – La blockchain, révolution dans la révolution
La profondeur de la concurrence entre droit et le numérique
Un impact plus direct sur le monde physique
Les contrats intelligents (smart contracts)
Les decentralized autonomous organisations (DAO)
Des critères de légitimation assez classiques
Une désintermédiation plus profonde
Du pouvoir décentralisé au pouvoir distribué
Une désinstitutionnalisation plus profonde et plus crédible
À chacun exactement son dû
Le risque d’une radicalité de la norme technique
Les vertus de la respiration
Les mérites de l’incertitude
Éloge du jeu
L’extrémisme de la mémoire
Deuxième partie – Ce que la justice digitale fait à l’idée de justice
Chapitre VI. – La quatrième dimension de l’audience
Une désintrication de l’espace et du temps
Structuration autour de l’audience et iterative process
Le résultat de deux chiffrages
Une désintermédiation de la preuve
Le travail préalable de verbalisation des faits
Une preuve qui parle d’elle-même
Le temps de conservation des preuves
La précision de l’horodatation
Un appauvrissement de l’expérience du procès
Discontinuités dans la production du sens
La dépendance à l’outil
Les enjeux de la déritualisation
L’enchaînement technique et le détour par la forme symbolique du rituel
Chapitre VII. – Juges inanimés, avez-vous une âme ?
Une médiation sous l’égide de la « quatrième partie »
Une forme de justice systémique
Une justice entièrement online
Des jurés distribués
Un ordre distribué
Le « jeu » de la vérité
Le tiers intéressé
L’exécution automatique des décisions
Un au-delà de la démocratie ?
Une inversion des principes démocratiques
Lieu vide de la loi, centre occupé par la technique
Chapitre VIII. – Une fonction prédictive ?
Les opérations de la justice prédictive
« Désécriture » et réécriture du jugement
La corrélation
« Quantitas non auctoritas facit legem »
Une rectification constante des prédictions
Les différentes techniques prédictives
Le traitement d’informations dynamiques
Interrogations épistémologiques
Peut-on remplacer la causalité par la corrélation ?
Quelle est la taille suffisante ?
Le futur peut-il être déduit du passé ?
Peut-on encore être déterministe et prédictif à la fois ?
Problèmes soulevés par l’application de la prédiction au jugement judiciaire
Différence entre prescription et prédictibilité
Risques systémiques
Un nouveau savoir juridique
Quand la connaissance de la norme se combine avec le marché
Chapitre IX. – Lorsque la loi disparaît…
Une norme personnalisée et la fin de la généralité de la loi
De la règle générale à l’injonction personnelle
Le devenir norme de la règle de droit
L’injonction et la plasticité de la norme
Une sanction personnalisée et la fin de l’égalité devant la loi
Prédiction et comportement
La loi, c’est le sujet
La justice indiscutable du hacker ?
L’aggravation des inégalités
De la délégation à la peur de la relégation
Chapitre X. – Jugements sous influence
L’horizontalisation du contrôle
L’évaluation/recommandation
La notation
La pression de la multitude
Cent collègues dans chaque jugement
Cent-vingt-trois clients en un
Soixante-quinze pour cent des affaires et la mienne
La multitude et l’exclusion
L’influence et la convergence des jugements
L’influence par le réseau
La rigidification des conduites
Le paradoxe de Von Foerster
La nouvelle extériorité aux relations interindividuelles
Une défaite pour la démocratie
Chapitre XI. – Le grand ajustement
Digitalisation et qualification juridique
Un nouvel équivalent général
Digitalisation et qualification juridique : deux voies concurrentes pour normer le réel
Symbolique contre science
Continuité de la digitalisation, discontinuité de la juridicisation
Non pas un langage commun, mais des correspondances actives
Une loi prise sous la dictée du monde
Densification de l’espace et intensification de l’expérience du monde
Une transformation permanente
Justice as fairness, justice as fitness
La justesse des rapports sociaux
Des règles auto-correctrices
Un darwinisme juridique
Troisième partie – Ce que l’idée de justice commande à la justice digitale
Chapitre XII. – La justice à cœur
L’appel à la justice
La justice comme limite à l’hubris numérique
L’arrêt d’une justice « différante »
L’arrêt par une force politique externe
Bilan de la justice digitale à l’égard de l’idée de liberté
Un espace physique qui réintroduit la dimension du sensible
Un tiers qui simplifie
La tragédie du numérique
Protéger l’humanité de l’homme
Une justice sans hommes ?
Désormais, l’humanité a un prix
Une nouvelle forme de pauvreté symbolique
Le pari de la faillibilité
Conclusion""
Antoine Garapon est magistrat et secrétaire général de l’Institut des hautes études sur la justice. Il est l’auteur, aux Puf, de Démocraties sous stress (avec Michel Rosenfeld, Puf, 2017) et de Deals de justice (avec Pierre Servan-Schreiber, Puf, 2013).
Jean Lassègue est chercheur au CNRS, attaché à l’Institut Marcel Mauss (EHESS, Paris). Ses travaux portent notamment sur l’informatique comme étape dans l’histoire de l’écriture (Turing, Les Belles Lettres, 1998)"
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