uneimageuntexte est un challenge amateur permettant aux auteurs en herbe d’écrire leurs propres petites histoires.
Le principe est simple : une image choisie et postée par le maître du challenge sert d’inspiration aux participants qui imaginent une histoire de 2000 mots maximum dans le style, le genre et l’esthétisme de leur choix. Tout est possible, la seule limite étant l’imagination !
À la fin du challenge, le maître choisi parmi les textes participants celui qu’il préfère personnellement et déclare son auteur vainqueur.
Le vainqueur devient le nouveau maître du challenge et choisi, à son tour, une image de son choix qui servira d’inspiration pour le challenge suivant.
Dans le hamac suspendu à l’ombre du tilleul et du chêne américain, je farniente. Le chant des chardonnerets me berce tandis que le parfum des pivoines et du sureau s’insinuent dans mon corps et me transportent à la frontière de l’irréel. Mes paupières se baissent, mon cerveau devient nuage et une autre dimension s’installe.
Devant moi se dessine un paysage automnal triste et sombre au ciel chargé de gros cumulus noirs. Un arbre mort, aux branches dressées vers le ciel tels des bras qui s’agitent, se dresse en travers de ma route me forcant à m’arrêter. L’ atmosphère est lourde, morbide. Une envie de fuir m’envahit.
Soudain, sorti de nulle part, apparaît la silhouette de mon fils. Il se tient debout devant moi de dos et porte un bébé dans les bras. Son regard semble être en direction de l’arbre et j’ entends sa voix douce parler à l’enfant. Il lui raconte quelque chose que je n’entends pas très bien mais qui se matérialise sur un livre géant ouvert au centre du tronc. Une longue route sans fin se dessine sur les pages baignées de lumière et, comme dans un film, des personnages vivants apparaissent.
Je comprends alors qu’il parle de ses ancêtres et du long chemin que chacun a parcouru pour arriver jusqu’à elle, sa fille née depuis peu.
Il lui parle de cet ancêtre italien horloger bijoutier qui quitta son pays pour on ne sait quel raison, s’installa à Rennes au moment de la Révolution française et épousa une Bretonne.
Du fils de ce Guiseppe qui devint avocat, de Charles qui perdit sa mère à sa naissance et qui fut procureur impérial.
Il parle du décès de Marguerite, du mariage de Charles et d’Hélène, de l’éducation donnée aux enfants, de la guerre de 1870.
Il décrit la belle maison familiale qu’Henri et Pauline ont embellie ; les joies, les peines, les maladies, la naissance de Robert et des ses frères et soeurs, la guerre de 14/18 puis celle de 39/45.
Puis il parle de Geneviève, son arrière grand-mère, si triste d’avoir perdu son jeune frère pendant la dernière guerre contre l'Allemagne qu’elle refusait que sa fille épouse un allemand. De ses grands-parents qui parlent toujours d'une époque ou le téléphone et la télé n'existaient pas et qui vivent sans Internet.
Et enfin il évoque ses parents qui, dit-il, lui raconteront eux-même leur vie parce que c’est leur rôle et qu’ils attendent cela depuis longtemps.
Il embrasse la fillette endormie, lui murmure à l’oreille qu’il a encore sa propre route à lui raconter mais qu’il fera cela plus tard, quand elle lui posera des questions. Puis il avance doucement vers les pages du livre comme pour pénétrer à l'intérieur.
A cet instant l’émotion me gagne, je veux le retenir mais une brume légère l’enveloppe et le fait disparaître comme par enchantement.
Mes paupières se soulèvent et une drôle de sensation m’envahit. C’est comme si la mort et la vie venaient de se côtoyer et qu’elles me disaient : « Nous cheminons côte à côte, Nous sommes toi, Nous sommes eux, Nous sommes l’existence ».
Je réalise alors que ma vie n’est que la continuité d’autres vies et que je suis sur terre pour transmettre l’amour et les connaissances de mes ancêtres.
J’ai souvent entendu l’expression : « LA ROUTE EST LONGUE » mais je n’y avais jamais prêté attention. Il aura fallu que j’atteigne l’âge de la retraite, les petites siestes du hamac et les rêves pour commencer à la comprendre.
Lorsque l’on fait des études secondaires on étudie la « philo » et je suppose que cela apprend à réfléchir sur le sens de la vie et de bien d’autres choses. Moi je n’ai jamais aimé l’école et ne suis jamais allée au collège, lycée et encore moins à l’université. Je me suis laissée portée par le courant, donnant de temps à autre quelques coups de pagaies pour aller là ou mon instinct me disait d’aller.
Enfant, je vivais le moment présent sans jamais me poser de questions. Malheureusement, en agissant ainsi il était inévitable que je fasse des bêtises et les adultes s’évertuaient à me demander de réfléchir avant d’agir.
Adolescente ce fût encore pire. Je ne voulais qu’une seule chose, VIVRE.
Vivre était pour moi synonyme de liberté. « Pas de vie possible sans liberté » aurait pu être mon slogan. Il fallait que je respire librement, que je parle librement, que j’agisse librement et tout cela SANS réfléchir. Quelle inconscience et quelle insouciance !
C’était une époque où le mot liberté, pour une adolescente en particulier, méritait qu’on se couvre d’une armure et qu’on parte en croisade, effectuant mille et un combats, tombant et se relevant maintes fois. Rien ne m’arrêtait. J’agissais toujours selon mes convictions et mon instinct et tout cela sans jamais réfléchir.
Puis vînt l’âge adulte, la vie de couple, les enfants et les obligations. Je n’ai pas le souvenir d’avoir beaucoup réfléchi lorsque les enfants étaient petits. J’étais devenue une personne sage et logique, j’avais la liberté que j’avais choisie et je vivais, certainement par chance, comme j’en avais toujours eu envie.
La route a commencé dès ma plus tendre enfance et c’est seulement maintenant que je le comprends. Ce rêve a ouvert les portes de ma vie et de mon inconscient. Il a fait de la réflexion une évidence et non une obligation.
Ce paysage d’hiver est ma mort mais le tronc de l’arbre est là d’où je viens. Il est source et racines de ma vie, de ma famille et de ses ancêtres. La route est bosselée, certes, mais c’est un long tobogan sur lequel je glisse et d’où je me relève en riant.
Quelle joie de pouvoir regarder en arrière et d’être capable d’en tirer les leçons. Chaque chemin de vie de mes ancêtres est en moi tel un livre ouvert que j’ouvre et ferme à volonté pour le plaisir de continuer ma route en restant sereine.
Finalement, je dirais que le rêve est là pour nous éveiller et que nous nous devons de le lire pour apprendre qui nous sommes.
Merci a @depereenfils pour ce challenge et à @archeothot pour cette image qui m'a plongée dans mon inconscient.
On sent une part d'autobiographie dans ton récit. Une grande lecon de vie! La liberté est si difficile à garder, c'est quelque chose de précieux, sans cela difficile d'être créatif. J'adore, ton texte est si emouvant et philosophique. Pas besoin d'avoir fait de longues études pour bien connaître le sens de la vie ! 😉
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Je n'ai pas réussi à partir sur une autre route que celle de ma vie et voilà le résultat, un texte pas très original ni très excitant!
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Tout au contraire, à chaque phrase j'avais hâte de lire la suivante et de découvrir la suite de ta vie. Très émouvant et très excitant. On sent une certaine sérénité et une certaine satisfaction du chemin parcouru. Bravo.
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Si au contraire , ça reste original même si c'est du vécu.
Il y a beaucoup de gens qui ne se permettent pas cette liberté !
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MERCI Ofildutemps pour cette histoire pleine de sagesse à transmettre... Oui, bonheur ne peut exister sans liberté et liberté ne peut exister sans bonheur. La liberté est le détachement... là est l'ultime liberté. Mais un détachement avec amour, comme tu viens tout juste de nous l'exposer. Grandiose ! J'aime bien les siestes, tiens...
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merci @tiloupsa, bonne sieste.
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