Allaitement et accouchementsteemCreated with Sketch.

in grossesse •  7 years ago 

allaitement

Parce que l'allaitement commence avant la tétée d'accueil... Mais qu'on ne le sait pas toujours!

Lors de ma première grossesse, nous étions comme tous jeunes parents... 

On n’en savait pas grand-chose. L'allaitement je connaissais. Ma mère avait allaité quelques mois ma dernière sœur. Ma cousine avait allaité notre neveu, bien que je n'aie pas souvenir de l'avoir vue allaiter devant moi. Ma belle-sœur était ma version la plus à jour de l'allaitement, elle avait allaité notre neveu une moyenne de dix-huit mois à l'époque. D'ailleurs ça me paraissait énorme dix-huit mois! Je me souviens que plusieurs fois on s'était fait la réflexion avec mon amoureux que jamais on allaiterait aussi longtemps ! Mais ça... c'était avant ! On en reparlera!

Nous étions donc là, moi avec mon petit pois bien au chaud, et mon amoureux en fière supporter des évènements qui nous attendaient.

A ce stade l'allaitement était une option, parmi d’autres quand tu deviens jeunes parents :

quels cours de préparation à la naissance ?
Péridurale ou pas ? Berceau ou cododo ?
Couches jetables ou lavables ?

tu dois sans doute connaitre tous ces questionnements et bien d’autres, si toi aussi lecteur, tu es parent, confirmé ou en devenir !

Bref, nous partions sans idées, sans a priori, sans questions… Ah si ! Quelques questions techniques sur l’allaitement auxquelles a patiemment répondue notre sage-femme diplômée en lactation à l’époque. Des questions du genre : le temps de conservation du lait une fois tiré? Tire lait manuel ou électrique? Faut-il stimuler avant l’arrivée de bébé… et tant d’autres. Je devais bien en avoir tout une feuille A4, pour quelqu'un qui ne se posait pas de question !

Nous avions obtenu toutes nos réponses, des contacts utiles, comme celui de notre collectrice du lactarium, qui anime aussi une fois par mois des réunions allaitement à la maternité. Mais nous repartions comme nous étions arrivés, sans idées reçues, sans décision certaine de ce que nous allions faire.

Et puis bébé est arrivé. 

Un beau petit garçon, qui après quelques péripéties d’accouchement, est arrivé en bonne santé et vivant !

Ce jour je m'en souviendrais toute ma vie... un Samedi de novembre, par une fraiche matinée d'automne. Le travail avait commencé la veille, mais rien qui ne méritait un déplacement à l'hôpital. Alors au petit matin j'appelle la maternité, histoire de faire le point, mais je suis en contractions irrégulières alors personne ne s'affole!

"Prenez votre temps, mangez, douchez-vous et passez pour un contrôle"
qu'elles me disent gentiment.

Mais moi je savais! Je sentais dans mes tripes et tout mon corps que c'était pour aujourd'hui!

La journée s’est déroulée tranquillement, juste un besoin viscéral de bouger, de marcher! La salle de naissance balnéo toute à moi, un bain chaud délicieux! Un col qui se dilate... un repas... un deuxième bain chaud... Tout se déroule sereinement, doucement, juste entre mon amoureux et moi, avec la sage-femme qui passe la tête de temps en temps, mon amoureux qui lui fait signe que tout va bien nous gérons, bébé-maman-papa, une équipe comme depuis l'installation du petit pois!

Le moment vient où la balnéo ne suffit plus. Je sors. Il faut que je marche, que je bouge comme au matin avant mon premier bain. Je danse sur place et me mets à faire vibrer ma gorge, à chaque contraction des *"mmmmmh" *qui forme des mélodies tout droit sorties de mon imagination. Plus personne n'existe il n'y a que bébé-maman-papa.

Mon amoureux qui se laisse tordre le coup à chaque contraction car j'ai mes bras autour de sa nuque le corps penché en avant, pour exécuter ma drôle de danse et mes jolis chants. Je les aime mes sons!

Puis vient la question fatidique, mon col est assez ouvert :

"alors vous souhaitez qu'on appelle l'anesthésiste".

Miss troutrouille rapplique dans mon cerveau de primipare sans expérience... :

"oui!".

Et tout s'enchaine! D’abord l'apaisement des douleurs. Puis plus rien qui ne se passe. Mon col s'ouvre oui, mais bébé ne veut pas descendre! Pas fou, il fait froid en bas! Pendant tout ce temps on blague avec mon amoureux.

La sage-femme rompt la poche des eaux, le liquide est teinté, elle n'aime pas trop ça, mais ne s'affole pas. Du moins en apparence. Mon amoureux et moi blaguons toujours.

Bébé ne descend toujours pas. Un peu d'ocytocine pour aider à contracter et décider bébé à descendre. Toujours rien! Mon amoureux regarde vers le monitoring, fait une drôle de tête, mais sur le moment je ni prête pas attention. Il stresse mon amoureux, comme tous les jeunes papas. On blague encore... Une idée s'insinue en moi pourtant depuis que j'ai aperçu sa tête, je le connais trop bien mon chéri.

Mais je refuse d'entendre, d'écouter ma tête. Je veux faire confiance à mon corps, à mon bébé. Ils savent quoi faire!

Avec l'ocytocine j'ai le droit à un joli masque à oxygène! Il me gêne ce masque, et puis ça me manque de bouger, mais avec la péridurale si je me mets debout c'est la gamelle assurée! J'aurais dû la refuser... je me rouspète un peu intérieurement! ! En plus je commence à voir des paillettes devant mes yeux! Je ris, je dis à la sage-femme :

  • "AH je vois des paillettes!"
  • "Qu'est-ce que vous voulez dire?"
  • "Que dans deux minutes je vais tomber dans les pommes, c'est sur!"

Visiblement j'ai dû donner un signal d'alerte, car le gynécologue est déjà là ! On va passer en salle d'accouchement pour une césarienne d'urgence!

  • "Tout va bien se passer" me dit le gynécologue confiant
  • "Prête docteur, pas de soucis, tant que notre bonhomme va bien!" lui réponds-je d'un air jovial.

On passe dans la salle des urgences. Je pressens l'urgence, mais elle reste vague, pourquoi tout le monde s'affole, mon bébé va bien! Et puis ce n’est pas grand-chose, on ouvre on le sort!

Mon amoureux doit rester dehors, il ne peut pas venir... je n'aime pas ça, mais bébé avant tout! Je vais prendre sur moi, tout ira bien! Dans la salle tout le monde est prêt, l'urgence se fait sentir, oppressante, mais tout me monde essai de rester détendu, pour me préserver je suppose... Je n'ai personne à qui parler, personne à qui donner la main... Gentiment l'anesthésiste me parle, me demande de la regarder. Mais je ne la connais pas cette dame, je veux une sage-femme, celle avec qui je plaisante depuis ce matin, je veux mon amoureux... la panique s'installe insidieusement en moi... Je la sens, mais essaie de la repousser..

La phrase fatidique arrive... ces simples mots que je n'oublierais jamais

"scalpel s'il vous plaît"...

Et là tout bascule, ma rationalité se fait la malle sans moi, cette goujate! Elle me laisse là pantoise, inquiète pour mon bébé... Mon bébé... c'est une césarienne, c'est important, tout se passait très bien, je ne serais pas là s'il n'y avait pas un problème... Mon bébé... Qu'a-t-il? Pourquoi il n’est pas descendu... Les pires scénarios passent dans ma tête, et ma rationalité ne veut pas revenir....

Je respire... Mon bébé... Je pense à mes cours d'hypnose... Mon bébé... je visualise ma bulle, mon coin de sécurité... Mon bébé... J'ai froid, je tremble, on m'a pourtant mis deux couvertures chauffantes... Mon bébé... Ça m'obsède, c'est une litanie profonde et sourde... S’il ne se dépêche pas c'est moi qui le sors !

J'entends, mais n'écoute pas... Ca y est, ils ont sorti mon bébé, apparemment... mais mon esprit étouffé par la panique ne capte pas... je vois, j'entends mais ne vis plus rien, que dans l'expectative d'entendre mon bébé crier, pleurer, respirer qu'importe !

Je me souviens très précisément d'une seconde phrase dans tout ce brouhaha de souvenir. Le gynécologue qui baisse un peu le drap

"N'ayez aucun regret, il avait le cordon autour du cou et déjà serré, si vous aviez accouché par voie basse j'aurais dû vous arrêter, je n'aurais pas pu passer mon doigt entre le cordon et son cou pour le dégager"

Ok... bébé va bien... Mais je ne l'entends toujours pas... Dans ce même laps de temps la sage-femme fait le tour du champ opératoire pour me présenter mon bébé... On me prévient, il est un peu violacé mais c'est normal. Oui ça va je sais à quoi ressemble un bébé qui sort du ventre de sa mère, moi aussi je regarde des films!

Elle arrive, mon bébé dans les mains, mais elle a cette façon de le tenir... son corps au creux de ses mains, mais sa tête dans le vide... Je le vois ce corps inanimé, cette tête qui pend, il n'est pas violacé, il est bleu, nu, à vif...

"C'est un beau garçon" me sourit-elle doucement

Je le regarde trois secondes à peine... je ne vois qu'une petite chose morte, inanimée... je ne le regarde pas plus il ne faut pas que je m'attache, il ne respire pas... mais pourquoi il ne respire pas bordel?! Et elle, elle ne s’affole pas? Tout va bien? On fait quoi on boit un café maintenant ou sa peut attendre que mon bébé respire?

"Qu'est-ce que vous faite encore là?"
lui réponds-je d'un ton aussi aimable qu'un pavé en pleine tronche ! Maman panique a parlé.

Ma bouche a dit ça, mais ma tête suppliée juste qu'elle se dépêche et me ramène mon bébé vivant, RESPIRANT! Je veux le voir respirer, l'entendre, c'est important pour moi, pour que ma tête connecte tous les morceaux de ce film passé d'un coup en avance rapide.

La porte s'ouvre la pendule du couloir indique 21H11. Mon bébé est né à 21H11... Ma tête se demande si ce sera aussi l'heure de sa mort, mais ca je ne le dirais jamais à personne... Je vois mon amoureux, mon cerveau ne comprendra la scène que plus tard, mais ses yeux sont remplis de panique. Je ne l'ai jamais vue comme ça. Alors je panique encore plus, je tremble à tel point que l'interne doit s'assoir sur moi pour me recoudre (chose que je n'apprendrais que plus tard de la bouche de cette super interne aux mots très doux et qui a été visiblement aussi secouée que moi !). Entre-temps tout le monde entend mon bébé pleurer. On sent que le publique se détend d'un coup!

Le gynécologue me dit

"vous entendez il pleure, c'est super! Il va bien!"

Non je n'entends pas, je n'entends rien! J’essaie de me concentrer, mais rien. Je suis déjà une mauvaise mère. On me dit qu'il est en peau à peau avec papa... Ca y est je respire! Tiens! Je crois que je viens de battre un record d'apnée inconsciente! Il est avec papa, il respire, il va bien. Pas de mot couveuse, ok... Mon fils va bien.

Mes soins se terminent, la salle se vide, la sage-femme revient près de moi. Tiens, tu es là toi? C'est que mon fils va bien!

Elle me borde, me met au chaud, elle me donne des nouvelles de mon fils, à voix basse comme pour contre balancer toute l'agitation vécu il y a encore quelques secondes... je veux retourner dans ma chambre, je veux mon amoureux... Elle m'écoute, elle me rassure, elle va aller chercher le papa... Elle a entendu que je l'avais beaucoup réclamé pendant toute l'opération... Elle y va, elle a une voix rassurante, apaisante... Je crois qu'elle entend moins besoin urgent de retrouver mon amoureux... Elle tamise la lumière, et me dit que papa et bébé vont arriver... Je dois encore rester là, mais mon amoureux et mon fils vont arriver. Ils vont venir avec moi ici dans cette salle devenu tout à coup grande et froide sans personne d'autre que moi. Ca ne tarde pas, même si ça me paraît déjà trop long, elle fait d'abord entrer mon amoureux. Je tremble encore, des spasmes incontrôlables rien à faire. Mon amoureux entre et je me sens déjà mieux. Il me touche, me caresse, me check inconsciemment ! Ça m'apaise. Il m'apaise. La sage-femme ouvre la porte, elle a mon fils dans ses bras, enroulé bien au chaud dans la couverture polaire bleue que nous lui avions choisie (oui je sais, c'est cliché!) c'est comme dans un film. Je tremble encore, mais la perspective qu'elle pose ce petit être sur mon corps et un électrochoc. Mon fils ne peut pas percevoir ce genre d'émotion comme première approche de notre relation. Il faut que je me calme. C'est impératif et non négociable. Elle approche. Comme une injonction intransigeable, mon corps se calme. Plus un seul tremblement.

Elle le dépose, là, en douceur, sur mon ventre, notre fils, ça y est... ce n'est plus le bébé, mais mon fils… Notre tout petit, qui par un réflexe des plus primaires et archaïques remonte le long de mon corps meurtri et fatigué, pour venir chercher ce flux vital à sa vie. Mais aussi à sa survie de petit d’homme, dépendant de la source mère pour continuer à grandir et murir dans ce monde d’un coup si brutal. Monde dans lequel il va devoir évoluer, et pour lequel des millénaires d’évolution ne l’ont pas encore préparés (mais c’est là un autre débat, voir le sujet d’un autre article !). Et c’est avec une émotion intense, une révélation primaire que je le laisse faire, et admire sa volonté, sa patience, son énorme capacité pour un être si petit, si immature à trouver ce qui lui est naturel et nécessaire. Nous sommes émerveillés, subjugués… Une évidence naturelle s'impose à nous. Nous allons allaiter. Il n’est pas question d’une autre voie. Je dis « nous » et direz toujours « nous » en allaitement, car à partir de ce moment et jusqu'au bout, pour nous l’allaitement sera vraiment une aventure familiale. Il est évident pour nous que pour qu’un allaitement fonctionne il faut que cela soit une évidence pour tous les membres qui entourent l’enfant et la mère. Cela afin de leur apporter un maximum de soutien dans les moments de doute, de fatigue intense, et de tous les aléas physiologiques que peut te faire croiser l’allaitement (engorgement, candidose, muguet et j’en passe !)

Notre voie lactée était ouverte, l’aventure engagée, et nous étions en route sur un chemin qui nous ne le savions pas encore aller nous faire cheminer sur bien des choses !

L’allaitement de mon grand s’est passé sans trop d’encombre, quelques embuches, surtout des engorgements, et bien que j’ai dû poser une ou deux questions de temps en temps, je n’ai jamais vraiment fait appel à de l’aide extérieure, favorisant notre écoute, l’écoute de nos corps, de nos besoins (alimentation, sommeil) et faisant une confiance que je peux qualifier aujourd’hui de « quasi aveugle » à mon instinct, mais aussi à celui de notre enfant.

Suivant ses besoins, ses rythmes, je n’ai appris que bien plus tard la fameuse règle du 3.6.9 jours, semaines et mois qui ponctuent de manière générale un allaitement et correspondant au pic de croissance de notre bébé. Et tant d'autres choses encore dont nous parlerons dans d'autres articles que je vous prépare !

Ce jour-là, avant même que notre fils soit né, alors même qu'on l'aidait à sortir de mon ventre... L’aventure était lancée… Et quelle aventure quand on regarde en arrière maintenant ! Car aujourd'hui ce n'est plus un, mais deux bébés que j'ai le bonheur (et l'immense fatigue!) d'allaiter... Et c'est si beau et si doux à mon coeur de maman...

Avant de conclure cet article pour de bon, j'aimerais remercier l'équipe qui s'est occupée de nous. Mon récit peut, peut-être, secouer, mais j'évoque ici mon ressenti au coeur de l'accouchement que j'ai vécu, il me fait encore pleurer moi-même, de remuer toutes ces émotions pêle-mêle. Mais avec le recule, des brides de ce que j'ai vu et entendue mais que mon cerveau ne pouvait analyser sur le moment me sont revenus. Et l'équipe a toujours fait en sorte d'être humaine, ils sont resté calmes, mais rapide et efficace. Tout du long gynécologue, sage-femme et anesthésiste m'ont parlé, rassuré, expliqué -sans ajouter d'infos en trop- ce qui se passait ou aller se passer. Je me souviens de brin d'humour de gynécologue, de ses mots de soutien "vous gérez super bien", d'essayer de dédramatiser la situation

"Ca arrive parfois... vous ni pouviez rien... mais vous avez assuré jusqu'au bout! c'est super".

Nous avons été chouchoutée pendant notre séjour. Alors un grand merci, car je sais que ce récit, n'évoque pas leur gentillesse, leur professionnalisme et leur humanité dont ils ont fait preuve au mieux de cette soirée mouvementée pour tous.

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