Et si on arrêtait de parler de Blockchain ?

in blockchain •  6 years ago  (edited)

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Les Blockchains sont souvent comparées au réseau Internet, lui prédisant un avenir encore plus radieux. Dans la réalité, les utilisateurs d’Internet s’intéressent surtout aux applications qui ont permis de révolutionner la façon de communiquer et d’accéder aux informations. Et si l’histoire se répétait ? Et si le plus important n’était pas la Blockchain, mais les cas d’usage qu’elle permet de développer ?

De l'Internet...
Même si l'Internet des transactions reste encore trop souvent lié aux crypto-monnaies, la technologie a envahi les fils d'informations des réseaux sociaux avant de conquérir l'ensemble des médias classiques, journaux, radios et télévisions, d'abord dans les rubriques spécialisées puis de plus en plus dans les informations généralistes.

Là où Internet est utilisé pour transmettre des paquets de données entre deux entités, la Blockchain permet à la confiance de s'établir entre deux entités.

Qui aujourd'hui, se soucie encore de savoir qu'Internet est un réseau informatique à commutation de paquets composé de millions de réseaux publics et privés ? Que l'information y est transmise grâce à un ensemble standardisé de protocoles de transferts de données ? Que quelques années après sa naissance, les experts s'interrogeaient sur la difficulté à corriger les erreurs de transmission du protocole NCP, donnant ainsi naissance à un nouveau protocole avec une couche transport TCP qui a fini par supplanter UDP et une couche Réseau IP (v4 à l'origine puis v6 avec la croissance du nombre d'utilisateurs) ?

En dehors des spécialistes des réseaux et télécommunications, personne n'a besoin de connaître la technologie du réseau Internet et donc personne n'en parle. En revanche, tout le monde utilise des messageries instantanées, des courriers électroniques et évidemment, le World Wide Web (le Web !), la toile d'araignée mondiale qui permet de consulter des informations, avec un navigateur, sur l'ensemble des sites mondiaux du réseau Internet au point d'ailleurs que pour beaucoup de personnes, Internet et le Web ne sont qu'une seule et même chose. L'histoire pourrait se répéter avec la Blockchain.

... à la Blockchain
Les experts et les centres de formation spécialistes de la Blockchain n'en présentent généralement que les seuls aspects techniques, y compris pour un public non expert. Est-il vraiment utile de parler de bases de données distribuées et sécurisées fonctionnant sans organe central de contrôle, de registre public permettant de s'assurer de la réalité d'une transaction ? Est-il nécessaire de connaître les avantages compétitifs entre preuves de travail ( Proof of Work), preuve d'enjeu ( Proof of Stake) ou preuve d'autorité ( Proof of Authority), l'histoire du problème des généraux byzantins, les débats sur les meilleures fonctions de hashage, les algorithmes de minage, le rôle des mineurs pour une transaction et celui d'un oracle pour un Smart Contract ?

Comme dans le cas du réseau Internet, ces technologies seront encore amenées à évoluer, comme le prouve les échanges récents sur l'algorithme consensus " hashgraph" présenté comme plus rentable, plus rapide, plus sûr, plus efficace et mathématiquement plus équitable qu'un consensus comme le Proof of Work. La performance reste effectivement un argument en faveur de solutions plus traditionnelles et conduira inévitablement à des évolutions et des innovations.

Une norme pour la Blockchain
Au travers de l'ISO/TC307 (Technologie des chaînes de blocs et technologie de registre distribué), la technologie de la Blockchain est désormais suivie par les organismes de normalisation (l'ISO au niveau mondial et l'AFNOR en France) qui s'attachent à faciliter l'adoption de la technologie, à donner de la confiance, à permettre une implémentation à grande échelle en assurant l'interopérabilité des solutions, avec un système de gouvernance et la prise en compte des besoins réglementaires.

Vingt-quatre pays participent ainsi à l'initiative Blockchain de l'ISO au travers de cinq groupes de travail ("Architecture de référence, Taxonomie et ontologie", "Cas d'utilisation", "Sécurité et confidentialité", "Identité" et "Smart Contract") complétés par un groupe de travail sur la terminologie. Lors du point d'étape à Tokyo du 14 au 17 novembre 2017, un groupe de travail Gouvernance devrait être ajouté pour couvrir l'ensemble des problématiques. La participation active des états dans ces groupes de travail est de bon augure pour déboucher sur une technologie mature et efficiente.

L'émergence des cas d'usage
De la même manière que les applications ont fait oublier les éléments techniques du réseau Internet, il semble maintenant important de se focaliser sur des cas d'usage en tenant pour acquis que l'infrastructure Blockchain est opérationnelle et en se focalisant sur la définition qu'en donne l'AFNOR : "Chaîne de blocs d'information, validés par consensus et stockés dans un registre distribué"

Cette simple définition permet de faire abstraction des aspects purement techniques et donc de s'intéresser enfin à des cas d'usage encore à l'état de prototype, voire insoupçonnés, dans tous les domaines : gestion des droits d'auteurs dans l'industrie musicale, traçabilité des produits frais dans la grande distribution, lutte contre la contrefaçon (diamants, sacs à main, oeuvres d'art...) dans le domaine du luxe et de la culture, suivi des carnets d'entretien des voitures dans le domaine automobile, cadastre, vote électronique dans le secteur public, certification des diplômes dans le domaine de l'éducation ou validation des parcours de formation, voire des parcours professionnels dans les entreprises, mise en place de solutions " GDPR Ready by design", paiement immédiat en cas de sinistre avéré dans le domaine de l'assurance, confidentialité des informations personnelles dans tous les secteurs... La liste s'allonge de jour en jour.

L'avènement des BNO
Les solutions de Blockchain sont généralement poussées par les promoteurs des Blockchains publiques (PermissionLess Blockchain), des Blockchains privées ou des Blockchains proposées par des consortiums (notamment dans le domaine bancaire).

De nouveaux acteurs appelés BNO ou Blockchain Network Operators se préparent à relever les défis à venir en proposant des solutions plus souples, plus ouvertes et moins onéreuses qui pourraient définitivement rendre la Blockchain aussi transparente que le réseau Internet en fournissant une infrastructure aux utilisateurs qui peuvent donc se concentrer sur leurs cas d'usage, leurs applications.

Nul besoin donc de savoir comment fonctionne la Blockchain : il suffit d'imaginer et de réaliser de nouvelles applications de transfert entre pairs, d'archivage ou de certification de données, de Smart Contract, ces contrats exécutés automatiquement en fonction de critères préétablis...

L'exemple de l'Estonie
Un pays, l'Estonie, joue le rôle de laboratoire à ciel ouvert. Il a bien compris l'importance des cas d'usages dans l'adoption d'une technologie, et ce, même si pour des raisons qui tiennent plus du marketing que de la pédagogie, il se présente aujourd'hui comme la Blockchain Nation. En mettant le citoyen au coeur de sa politique (" Citizen centric") et en disposant des briques nécessaires ( ID-Card, X-Road), il a su convaincre la quasi-totalité de sa population d'adopter un système complètement dématérialisé pour s'identifier en toute sécurité, payer ses impôts, voter, obtenir des documents administratifs, donner accès à son dossier médical personnalisé, créer et gérer sa société... Cette approche permet aux habitants du pays, et dorénavant ses e-résidents, de proposer sans cesse de nouveaux usages et créer une dynamique dans l'écosystème industriel que de plus en plus de nations observent avec intérêt.

À l'image de ce petit pays balte parti d'une feuille blanche lors de son indépendance en 1991, le moment semble être arrivé d'arrêter de parler de la Blockchain et d'imaginer les cas d'usage qui permettront d'accéder plus facilement aux services proposés par les administrations ou les entreprises à des personnes qui souhaitent réaliser des transactions de façon transparente, sans intermédiaire, de manière complètement sécurisée et dans le respect de leurs données personnelles.

Première parution de cet article dans le Cercle des Echos

Illustration LeMonde.fr

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Hi cheetah robot. Well seen : this article has actually been posted for the first time on "lesEchos.fr"

Bonjour.

Lorsqu'on réutilise un article d'un autre auteur, il est préférable d'avoir l'accord de ce dernier.
Auquel cas, il s'agit de plagiat. Bien qu'il soit techniquement possible de plagier sur le support steem, c'est en pratique mal vu par la communauté.

Même avec l'accord de l'auteur, il est préférable de mettre le texte en "quote"

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