Excédés par le mécanisme qui prévoit de conditionner l'accès à tout financement européen au respect de l'Etat de droit, les deux pays ont bloqué, lundi, sa mise en oeuvre. Un ultime obstacle qui intervient dans un contexte d'urgence économique maximale.
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Viktor Orban et Mateusz Morawiecki, les chefs de gouvernement des deux pays, sont vent debout contre un dispositif qu'ils accusent d'aller à l'encontre de leur souveraineté.
Viktor Orban et Mateusz Morawiecki, les chefs de gouvernement des deux pays, sont vent debout contre un dispositif qu'ils accusent d'aller à l'encontre de leur souveraineté. (Czarek Sokolowski/AP/SIPA)
Par
Gabriel Grésillon
Publié le 16 nov. 2020 à 18:05
Le chemin de croix du plan de relance européen n'est pas encore terminé. Après avoir été longuement suspendu à une âpre négociation entre les Etats-membres et le Parlement, ce projet d'injection d'argent frais qui doit venir au secours d'une économie sinistrée par la pandémie a buté, lundi, sur un nouvel obstacle majeur : le veto de la Hongrie et de la Pologne. En cause : le refus de ces deux pays d'accepter en l'état un mécanisme qui prévoit de conditionner, à l'avenir, l'accès aux financements européens au respect de l'Etat de droit.
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Union soviétique
La réunion des ambassadeurs européens auprès de l'Union européenne a, certes, permis d'entériner ce mécanisme : il suffisait d'une majorité qualifiée pour y parvenir. Mais Varsovie et Budapest, qui figurent régulièrement sur le banc des accusés en matière de respect de l'Etat de droit, ont utilisé un autre levier pour bloquer le dispositif : il fallait l'unanimité des Etats-membres pour autoriser la Commission européenne à lever les fonds qui devront abonder le plan de relance. « Deux Etats-membres ont exprimé des réserves », a résumé la présidence allemande de l'Union européenne.
Bien qu'évasive, la formule ne laisse aucun doute sur l'identité des deux pays. Au cours des derniers jours, la Pologne et la Hongrie n'avaient pas caché leur opposition farouche au dispositif sur l'Etat de droit, perçu comme une insupportable ingérence de l'Union dans leurs affaires intérieures. « Nous n'avons pas créé l'UE pour avoir une deuxième Union soviétique », avait tonné Viktor Orban, le Premier ministre hongrois. Même tonalité à Varsovie, où le Vice-ministre de la Justice, Michal Wojcik, a estimé qu'il s'agissait d'un « moment clé de notre histoire : combien vaut la souveraineté, un milliard, plusieurs douzaines de milliards, plusieurs centaines de milliards d'euros ? Pour nous, cela n'a pas de prix ».
Réalité sonnante et trébuchante
A Bruxelles, l'espoir demeure que ces postures masquent une réalité sonnante et trébuchante : au titre du seul plan de relance, la Hongrie doit toucher près de 7 milliards d'euros de subventions, tandis que la Pologne doit pouvoir compter sur presque 25 milliards.
Combien de temps ces deux pays pourront-ils bloquer un mécanisme dont ils doivent bénéficier ? Et comment tenir cette ligne vis-à-vis des opinions publiques, intérieures mais également européennes, à l'heure où la deuxième vague épidémique démontre l'urgence d'une relance économique ?
« Ce n'est pas la fin de l'histoire », estime une source européenne qui invite à « ne pas dramatiser la situation ». Une des portes de sortie possibles pourrait consister à accompagner le texte de mentions permettant de rassurer les deux Etats quant au plein respect de leur souveraineté. Angela Merkel, dont le pays assure la présidence tournante de l'UE, s'est entretenue avec les dirigeants des deux pays afin d'entendre leurs doléances.