Géorgie, le vin, entre tradition et modernitésteemCreated with Sketch.

in fr •  7 years ago 

Le berceau du vin


Vignobles de Géorgie, source : Pixabay

En Géorgie, dans la vallée de Kakhétie, on presse encore les raisins manuellement, en les foulants pieds nus. Je m’imaginais que c’était pour le goût, ce n’était pas faux, mais pas dans le sens que vous imaginez. Linguistes et archéologues voient la Géorgie comme le berceau du vin. Pas question de quitter le pays sans aller visiter une des nombreuses caves à taille humaine où le procédé de vinification est réalisé selon des méthodes ancestrales.

L’aventure commence à l’aurore et l’aurore est encore matinale en ce matin d’automne. Les rues de Tbilissi, si animées il y a à quelques heures, peinent à se réveiller alors que l’on se dirige vers le point de rendez vous. Sur la piste du vin, mieux vaut ne pas conduire. Un mini bus et des futures rencontres nous attendent.

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Chacun s’installe dans le van à la joyeuse invitation du chauffeur. Ambiance feutrée à l’intérieur, timidité et discrétion entre des inconnus qui vont partager une parenthèse de bonheur mais ne le savent pas encore. Ce mini bus est une petite Babylone, un couple d’Israéliens en voyage de noce, deux amies biélorusses, un jeune couple d’Asiatique, Thaïlandaise et Hong-hongais, vivant à Dubaï, une Libanaise et nous, couple Franco Espagnol à vocation nomade. Notre chauffeur, Lasha, Géorgien, fier et heureux de l’être.

La route vers le vin est émaillée de fréquents arrêts pour acheter divers produits dans les villages. Pains, friandises traditionnelles aux noix, fromages locaux, eau de vie.


La vigne dans l'architecture religieuse
Les Biélorusses connaissent très bien la Géorgie quelles retrouvent avec un plaisir évident. Jeunes elles y venaient en vacances, du temps ou Géorgie et Biélorussie faisaient partie de l’URSS. Elles parlent Anglais ce qui rend la route pleines de découvertes et de souvenirs passionnant à écouter. Notre chauffeur a beaucoup d’humour et d’autodérision pour raconter son pays, nos nouvelles amies biélorusses, travaillent beaucoup pour faire profiter notre groupe hétéroclite, de ses anecdotes.

Ne nous égarons pas, il s’agissait de parler de vin. Je passerai donc sur les nombreuses curiosités naturelles et culturelles rencontrées en route. Au bout d’un chemin fatigué, devant ce qui semble être une grande maison résidentielle, se cache notre cible, une cave et un vignoble.

Georges et Donovan nous accueillent pour la visite. Propriétaires, gérants ou employés, je ne sais pas, mais passionnés là je suis sûr. Comme Français je dispose immédiatement du traitement de faveur du à un spécialiste du vin, Georges s’occupe de moi et Donovan des autres. Je fais de mon mieux pour cacher mon inculture viticole et sauver l’honneur de mes compatriotes. Mon Anglais approximatif m’aide bien en l’occurrence, Georges poli, fait probablement semblant d’y croire.

J’ai découvert un monde incroyable ce jour là mais la conjonction de mon inculture, ma mémoire défaillante et surtout la dégustation qui a suivie m’en on fait oublier une bonne partie durant le voyage de retour. Le raisin, une fois vendangé est placé dans le fouloir. C’était avant des troncs évidés mais ceux que j’ai vus étaient de planches et de briques. Le raisin est foulé pieds nus pour éviter d’en abimer le goût en écrasant les pépins. Le jus est filtré, par un tapis de feuilles je crois, et coule par un trou vers des jarres de terres qui sont enterrées dans le sol et dont seule l’ouverture dépasse. Ensuite, il faut récupérer une certaine quantité de marc pour ajouter au jus et remuer régulièrement pour lancer le processus de fermentation. Le reste du marc fera une eau de vie appelée Tchacha … bonne à la consommation, mauvaise pour la mémoire. Les jarres sont hermétiquement fermées avec juste un tuyau pour la fermentation et restera tel quel jusqu’à ce que le vigneron décide que c’est prêt, quelques mois plus tard.

Laissons parler Dumas père :
Un dîner géorgien est un repas où les petits buveurs boivent leurs cinq ou six bouteilles de vin, et les grands leurs douze ou quinze. (…) C'est en Géorgie une gloire de boire plus que son voisin. Or, la moyenne du voisin c'est toujours une quinzaine de bouteilles.

Il n’y a plus qu’à gouter, on monte sur une grande terrasse avec vue sur le vignoble et la vallée. Il y a un temps de latence, je crois une négociation pour payer un peu quelque chose et ne pas abuser de l’hospitalité. Entouré des vapeurs de tchacha et de l’ambiance amicale je n’ai aucune idée de ce qui a été discuté. Mais le résultat est là, comme par enchantement la table s’est couverte non seulement de bouteilles mais aussi de mets variés de la région, fromages, miel, pains et autres. La musique a résonnée, les discours se sont succédé et tout à fini par des danses comme de coutume en Géorgie. Ma femme eut un moment d’inquiétude voyant que le chauffeur apportait sa large contribution à la dégustation mais, il faut bien le dire son inquiétude n’était partagée ni par moi ni par personne.

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Le vin de Géorgie est de plus en plus reconnu internationalement. La mode actuelle du naturel notamment met en vitrine les procédés de production traditionnels. Parmi les gros clients, la Russie et la Chine. Au vu des derniers chiffres publiés 2017 a été la meilleure année de leur histoire, d'un point de vue économique s'entend.

Le vin n’est pas la seule boisson alcoolisée en Géorgie. Il y a bien sûr la vodka pour des raisons historiques, la tchacha, distillée artisanalement qui se rapproche de la Grappa Italienne. Une tradition de brasserie, la bière vedette étant la Kazbegi du nom d’un village de montagne proche de la frontière Russe, tirant lui-même son nom du sommet montagneux qui le surplombe, le mont Kazbek. Et enfin, la Géorgie produit aussi ... de l'eau minérale.

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C'est toujours un plaisir de venir lire ces histoires de voyage, avec beaucoup de détails, un brin d'humour, c'est vraiment ce que je préfère. Hum... Tchacha et Grappa si cela se ressemble, ça doit être plutôt costaud hihi...

Merci @marie2018. Très costaud en effet ... selon la résistance de chacun à ce genre de chose

Oui^^ Je m'en doutais un peu, déjà la Grappa je ne peux pas alors cela, mais je ne bois pas donc automatiquement c'est un peu compliqué pour moi...

Merci Thierry pour ce récit. Plus délicieux que le vin, c'est ton écriture : parfaite, équilibrée, légère avec un zeste d'humour !

Tu dis ça parce que tu n'as pas encore goûté le vin 😉

ha!ha! bonne répartie, mon cher Cyrano : j'ai longtemps vécu en Dordogne, pays des vins joyeux... Mais c'est vrai que je n'ai pas encore goûté le vin de Georgie...

Tes pots passionnants n'ont pas l'aura qu'ils méritent.
Je ne pèse pas grand chose mais je t'offre mon vote.

Merci @duke77, beaucoup de posts sont passionnants dans pleins de domaines différents dont les tiens. Peu importe l'aura l'essentiel c'est de prendre du plaisir à écrire et à apprendre des autres.

Tu ne m'as pas fait voir ta cave...

J'ai tout bu !