Sauvetage en mer : une intervention en réel!

12h57. Le téléphone sonne. Sur l’écran, l’appelant est identifié : « Pascal SNSM ». Pascal est le patron de service cette semaine. Son appel, ça veut dire : Intervention!!! Je décroche et tout de suite j’ai la confirmation : « un mec qui a fait un malaise cardiaque au Grand Léjon » . Le temps de lui répondre que je suis là dans dix minutes maximum.

Toutes les affaires sont dans la bagnole comme chaque fois que je suis d’astreinte. Je suis content, cela fait un moment que je l’attends ma première véritable intervention. Et je file à Saint-Quay! Arrivé sur place, Yves est déjà là, Christian mais aussi Jeff et Jean Marc. Pascal arrive et nous dit de nous changer à la station et non sur la vedette car on attend les mecs du samu qui embraquent avec nous.

Dix minutes plus tard, tout l’équipage est sur la vedette, moteurs en route, et on a déjà viré les sièges pour installer le plan dur. L’équipe du Samu arrive: un médecin, un anesthésiste urgentistes et un ambulancier. Et du matériel. Il est 13h20 et la vedette décolle. Le CROSS (Centre régional des secours) demande à basculer sur le canal 68 et nous redonne le positions GPS exactes du bateau sur lequel un équipier a fait un malaise cardiaque.

Les deux moteurs de 500 chevaux à 75%, la vedette file à 18 noeuds. En une grosse vingtaine de minutes, nous sommes sur zone et nous voyons le gros voilier la Moana, toutes voiles affalées et au moteur qui fait des ronds dans l’eau. La mer est un peu formée. Pascal regarde les écrans : 35 noeuds de vent, mer formée, on ne sortira pas le petit zodiaque qui est dans la vedette. Nous allons nous mettre à couple sur notre bâbord (à gauche donc). Jeff nous coordonne: on place les parebattages tout le long de la vedette.

La mise à couple n’est pas simple. La vedette est plus haute que le voilier. Plus lourde aussi, nos vingt tonnes vont éprouver la coque du voilier qui est pourtant d’une belle taille. Il faut rajouter des parebattes et s’amarrer. A l’arrière et à la pointe. Les urgentistes du samu attendent que la manœuvre soit sécurisée pour passer sur l’autre bateau. Un premier boute (une corde pour les non marins) va lâcher… On met plus gros. Les taquets du voilier peuvent lâcher à tout moment. On renforce et Pascal met la vedette en marche pour éviter de se faire secouer par les vagues. La situation devient plus stable et le samu passe sur la Moana. Un homme de 39 ans allongé, couvert et allongé. Il fait effectivement un malaise cardiaque. Le plan dur est transféré sur le voilier : objectif ramener la victime sur la vedette.

Dix minutes plus tard, il est installé dans la cabine. Avec surveillance et monitoring. Il est conscient mais pas en forme. Pas d’hélicoptère à prévoir, on doit rentrer à quai. Un SAV est prévu (un véhicule des pompiers équipé). Pleins gaz et retour.

Il est 15h15 et la vedette est à quai. Les pompiers brancardent la victime. Pour nous c’est fini. Rangement du matériel. Débrief et satisfaction. On a rempli notre mission et il est peu probable que nous saurons la suite… et pourtant!

Vers 19h00, mon téléphone sonne. C’est une amie qui m’appelle. « Dis Vincent, t’étais sur l’intervention de la SNSM? » Réponse positive forcément. Elle me dit que David (son mec) faisait partie des équipages engagés, qu’ils sont arrivés à Jersey et qu’ils vont m’appeler pour nous remercier et nous confirmer que leur pote est hors de danger! Et en effet, David m’appelle.

Là, ça sent la joie! D’abord leur ami est hors de danger mais c’était grave. Une heure plus tard, il serait probablement mort. tous les équipages et notamment le skipper de la Moana tient à nous remercier de notre professionnalisme. Je promets de transmettre à l’équipe. En fait, la victime de 39 ans a commencé à se sentir mal vers 11h15. Ils mettront deux heures avec le comité de courses pour déclencher les secours. La suite vous la connaissez.

Personnellement, je suis ravi de ma toute première intervention réelle. Aucune fierté, juste le bonheur d’avoir fait ce que l’on m’a appris depuis des mois et de confirmer mon engagement total pour la SNSM. Pas plus d’adrénaline que ça. Pas le temps d’ailleurs. On est formé, on exécute. Bref, que du bonheur!